Les joggeurs

Une fois par semaine, histoire de garder la forme plus que la ligne, je cours dans un petit parc près de chez moi. Avec les beaux jours et surtout avec l’heure d’été, le nombre de joggeurs s’est multiplié. De nouvelles têtes ont fait surface. Hier, je n’ai reconnu que le monsieur aux cheveux hirsutes qui en fait marche à vive allure et s’arrête parfois pour exécuter les étapes du parcours santé et faire de grands cercles avec ses bras. Son accoutrement est plutôt insolite pour l’occasion : un pantalon noir assorti d’une veste de costard. Seules ses baskets rappellent la tenue d’un sportif.

Deux jeunes filles un peu rondelettes s’exerçaient à la marche rapide tout en papotant gaiement et un couple à la carrure d’athlète courrait ensemble d’un air sérieux. L’un de mes amis est parti en trombe puis a continué avec nonchalance, du lady gaga dans les oreilles. Moi, j’y suis allé doucement, un peu comme la tortue qui finit par rattraper le lièvre.

Un vieil homme au ciré jaune canari était assis sur un banc. Il avait posé sa bicyclette à laquelle était pendu tout un tas de sacs plastiques bien garnis. Je crois qu’il était déjà là les semaines précédentes. Dans un coin broussailleux et un peu à l’écart, j’ai soupçonné quelques jeunes de s’y échanger des herbes illicites.

Et enfin, la palme du joggeur le plus exaspérant revient à celui qui fait trois tours de parc quand je n’en fait qu’un, l’homme qui ne transpire pas, court très vite pendant très longtemps sans afficher la moindre pointe de souffrance. Sa performance semble ne nécessiter aucun effort. Son visage était comme figé : le sourire jusqu’aux oreilles, sa forme olympique me laissait envieuse et admirative.